Affichage des articles dont le libellé est jardins. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est jardins. Afficher tous les articles

mardi 24 mars 2020

Wisley et le prestige de la RHS

Wisley, dernier des jardins anglais visités en mai 2019 avant de reprendre l'Eurostar, était incontournable. Au sud de Londres, Wisley "le temple" du jardinage comme on le nomme souvent, propriété et siège de la Royal Horticultural Society (RHS), s'étend sur 100 ha avec toujours plus d'espaces de démonstration. Les anglais s'y pressent et le niveau de services est celui d'un parc de loisirs.

Une journée entière n'y suffit pas si l'on tient à s'attarder sur chacun des jardins. Dans ce kaléidoscope du jardinage et de l'art des jardins, chacun fait ses choix. 
J'ai déjà évoqué Wisley dans 2 articles précédents (Jardins sauvages, article du 18 février 2020 et L'humour british au jardin, article du 22 juin 2019). Quelques facettes m'ont particulièrement marquée.
 
Dès l'entrée, le manoir et son grand bassin en imposent. Le ton est donné.
L'imposant manoir de style Tudor mâtiné "Arts & Crafts" construit par la RHS dans les premières années 1900, siège de son administration, contribuent fortement à l'élégance du domaine.
A l'écart on découvre le charmant et plus discret cottage d'origine construit pour sa retraite par un riche homme d'affaires qui à Wisley créa un premier jardin d'expérimentation. La maison de George Ferguson Wilson s'accompagne d'un jardin dans le même esprit, un simple jardin de cottage.

Loin de s'en tenir à la tradition, Wisley présente des expérimentations notamment en prévision des bouleversements climatiques. La RHS a ainsi réalisé un jardin sur gravier "South Africa Meadow". Ce jardin relativement récent m'a laissé pantois(e) d'admiration par sa maîtrise, sa simplicité et son raffinement.



Un peu plus loin, ce jardin se prolonge par des floraisons aux teintes complémentaires. L'équilibre des masses végétales imbriquées les unes dans les autres et celui des contrastes entre les feuillages sont tellement réussis : on peut à la fois observer parfaitement chaque plante et admirer l'ensemble.
La grande rocaille de Wisley ("Rock Garden") est bien connue, très photographiée et présentée dans les magazines. J'y ai remarqué l'abondance et la gaieté de la petite armeria blanche (armeria maritima?) appelée gazon d'Espagne et l'aspect très naturel des plantations (grâce aux semis spontanés? au soin méticuleux des jardiniers? ou les deux?)


Nombre de visiteurs s'attardent aussi dans des serres extrêmement soignées qui présentent à hauteur des yeux des petites "plantes alpines ("Alpine Houses")
 
Wisley, c'est aussi une boutique d'accessoires de jardin avec des  pépites et une librairie abondamment fournie. Mieux que la pépinière "Plant centre" qui m'a déçu. Par contre j'ai été fière d'y voir des rhododendrons produits...en Bretagne par Stervinou. Comme quoi!

dimanche 15 mars 2020

Savill Garden, le jardin de Sir Eric

Entre Brexit et coronavirus, chacun  chez soi, mieux vaut continuer à voyager depuis son "home"... et publier ces articles sans attendre le joli mois de mai (?)
Première étape lors du voyage en Angleterre en mai 2019 Savill Garden, un jardin créé dans les années 1930 en lisière sud-est du parc royal de Windsor (Windsor Great Park).
 
A la demande du roi d'Angleterre George V et la Reine Mary, Eric Savill, inspecteur du parc de Windsor, entreprit d'éclaircir 10ha de forêt en friche pour aménager un jardin sur les deux versants d'un fond de vallon humide, d'où le nom initial du jardin "The Bog Garden". 
Photo Xavier Aubourg
Il dessina ruisseaux et petits étangs alimentés par des sources et introduisit sous le couvert des grands arbres conservés de nombreuses espèces ornementales.  Il créa ainsi un jardin forestier sauvage (woodland garden) et un jardin de marais dans un esprit très naturel. 
Photo Xavier Aubourg
Le succès du jardin fut tel que dans les années 1950 le roi George VI changea son nom en Savill Garden et Sir Eric Savill fut anobli. Fort de cette réussite on agrandit ensuite le jardin planté de différentes espèces de rhododendrons et d'azalées Kurume du Japon.
Photo Xavier Aubourg
Les plantations du jardin forestier ont été associées en fonction de leur intérêt aux différentes saisons : ainsi selon le moment on choisira de découvrir le Bois d'Eté, le Bois d'Automne... En mai 2019 nous avons évidemment privilégié le Bois de Printemps (Spring Wood) et la Promenade des Azalées (The Azalea Walk).

Une harmonie de rouges plus ou moins saturés. Photo Xavier Aubourg
Les somptueux sous-bois de rhododendrons, azalées, camellias se révèlent par d'étroits sentiers, de simples allées d'un "jardin sauvage". 
 Rhododendrons et azalées étagés ici en massifs rouges, roses et blancs. Photo Xavier Aubourg
En mai bien sûr nombre de rhododendrons et azalées étaient en pleine floraison. Ayant atteint l'âge adulte, les arbustes forment de grands volumes savamment entremêlés en harmonies de couleurs. 
Les grandes espèces ont pris des dimensions immenses et les floraisons de certains sujets ne sont visibles qu'en hauteur ou de loin. 
Je me suis attardée (...pas la seule, Xavier  et Nadine Aubourg aussi. Merci pour les photos) sur plusieurs rhododendrons portant des fleurs "campanulées" ou en clochettes (plus gracieuses à mon sens que les rhododendrons aux grandes fleurs serrées en gros bouquets ronds et compacts). Leurs coloris sont aussi nuancés et délicats. Plusieurs noms étaient à retenir.
Le rare rhododendron Arthur Stevens
J'ai ainsi découvert le rhododendron Arthur Stevens (un hybride de r.souliei x Coronation Day).  Les boutons roses s'ouvrent en blanc avec un fin coeur rouge. Le feuillage allongé en cuiller, vert foncé, a un revers plus pâle. Le port de l'arbuste est tout sauf guindé et la hauteur moyenne, environ 2m.
  
Parmi les associations très réussies, en blanc sous un immense rhododendron loderi King George (r.fortunei x r. griffithianum) l'azalée Palestrina (une de mes préférées...).
Le même rhododendron loderi King George dans lequel grimpe une clématite montana (grandiflora alba?). "Gorgeous !". Photo Xavier Aubourg
En lisière de sous-bois des rhododendrons yakushimanum hybrides plus ou moins nains (1m environ) sont nombreux. J'en ai remarqué plusieurs : Golden Torch (jaune pâle crème sur des boutons saumonés), Bambi (des fleurs rose orangé pâlissant ensuite, lumineux sans être criard à mi-ombre), Hydon Velvet
Le rhododendron nain Hydon Velvet, un hybride de r.yakushimanum et de r.bureavii, a le revers de ses feuilles orangé. Les fleurs rose pêche à l'ouverture virent au blanc.
Photo Xavier Aubourg
Plus récemment de nouvelles parties aménagées du Savill Garden ont été livrées aux horticulteurs : leur conception très formelle, les collections diverses dans les jardins d'été (vivaces, jardins de roses, plantes alpines, méditerranéennes etc..), sont tout autre chose. Nous n'étions pas venus là "pour çà".
Mais j'ai été séduite par le charme de cette modeste et désuète remise du jardinier, entretenue et soignée dans tous les détails : quelques joubarbes sur les ardoises, une clématite de printemps sur la palissade, une jolie fontaine en zinc... 

mardi 10 mars 2020

Great Comp Garden, le charme discret d'un jardin anglais

C'est un petit jardin privé et secret (près de 3ha quand même) entourant un ancien manoir du 17è siècle en pleine campagne du Kent, un jardin créé à partir de 1957 par Roderick et Joyce Cameron.
 
La cour d'entrée sobre, pour certains un peu sévère, ne préfigure pas la luxuriance du jardin.
 
Le pied de mur d'un commun dans la cour d'entrée (à droite sur la photo précédente) est ourlé d'un mélange vert tendre et pourpre de vivaces et de fougères assez courantes qui apprécient la mi-ombre fraîche et humide : rodgersia bronze, hosta au-devant, ligulaire à l'angle (...ou farfugium japonicum ?), fougères aux deux extrémités. Le contraste entre les volumes, les formes, dimensions et couleurs des feuillages est réussi. Quelques plantes imposantes se suffisent à elles-mêmes. 
 La rodgersia (rodgersia aesculifolia "Irish Bronze"?) commence à fleurir précocement en épis blanc crème (en fleurs plutôt l'été). Une plante vigoureuse et rustique haute de 1m, à feuilles de marronnier, aussi tenace au sec et ne craignant pas la concurrence des racines note Thierry Denis (Le Jardin du Morvan).
D'aucuns disent que ce jardin aurait inspiré Greta Sturdza au Vastérival...Une longue perspective s'étire au-delà de "the square", vaste terrasse engazonnée aménagée devant la façade principale du manoir. Cette perspective ondule et se glisse entre des jardins boisés (woodlands).
A Great Comp Garden au mois de mai des azalées, rhododendrons et magnolias tardifs étaient en fleurs dans les "woodlands". Au détour des allées le regard peut s'attarder sur un foisonnement d'arbustes et de vivaces. L'association des floraisons, d'apparence naturelle, est raffinée et subtile, souvent dans des teintes chaudes (exemple : des teintes orangées dans des verts acides ou argentés. Photos : cf. article du 21 janvier 2020). 
Au-devant d'un magnolia liliiflora défleuri, des thalictrum aquilegifolium s'apprêtent à fleurir entre tellimas, dicentras, persicaria ou polygonum (amplexicaulis?) et fougères
Des vivaces simples comme la tellima grandiflora, une persistante très rustique (à la floraison modeste en épis délicatement parfumés) qui se ressème à foison...accentue le caractère d'un "jardin sauvage", de même que les thalictrums, les dicentras (eximia?) ton sur ton...
Un gracieux rosier botanique jaune pâle grimpe à sa guise dans les arbustes voisins
Les rosiers botaniques, les clématites de printemps et les ronces d'ornement colonisent les arbres et les arbustes.
Une ronce d'ornement palissée et guidée sur un arbre
Great Comp Garden offre aussi plusieurs lieux intimes pleins de surprises dont "le jardin italien" de libre inspiration et très personnel ainsi qu'un charmant "jardin de ruines"(cf. article du 15 décembre 2020).
Le "jardin de ruines" incite le visiteur à la contemplation et à la rêverie
Depuis la disparition de J. et R.Cameron Great Comp Garden est sous la responsabilité d'un conservateur William Dyson, spécialiste des sauges. Celles-ci sont proposées à la vente en saison. 
 
Pour ma part j'ai découvert avec enthousiasme à Great Comp Garden les ronces d'ornement dont une superbe blanche (ce pourrait être rubus (x) tridel Benenden - d'après les descriptifs et les photos consultés sur le web -). Je vais "l'essayer" comme on dit souvent, dans la haie libre du bord de route...

dimanche 1 mars 2020

Scotney Castle Garden (Kent)

Etrange ressenti à l'issue de la visite de Scotney Castle. Non du fait du jardin, magnifique, qui s'étend en contrebas vers les ruines romantiques du vieux manoir médiéval (cf. aussi l'article du 15 décembre 2019). Le domaine géré par le National Trust comme tant d'autres en Grande Bretagne est largement ouvert au public.
Depuis les douves de l'ancien manoir Tudor, le château construit au 19è siècle domine sur la hauteur (en arrière-plan)
Cette (très grande) maison fut construite dans la 1ère moitié du 19è siècle par Edward Hussey III, un riche magistrat délaissant l'ancien manoir trop petit à son goût et sans confort. La maison, habitée par cette famille et son dernier descendant jusqu'en 1970, se visite à tous les étages. Des effets personnels et des souvenirs de famille sont restés partout : j'ai ressenti pour ma part un malaise à être ainsi témoin de leur intimité.
La demeure de Edward Hussey III sur le point haut domine les paysages : de la terrasse principale la vue s'étend au loin au-delà des prairies. 
Les haies basses en lignes soigneusement taillées rythment le paysage. Au loin un autre domaine... 
Sur le côté, des allées descendent vers l'ancien manoir en ruines et l'étang, comme autant de chemins de promenades. 
Edward Hussey III créa dans le même temps ce jardin, enrichi de multiples espèces d'arbres et arbustes à fleurs. Rhododendrons, azalées de Gand à profusion, magnolias, paulownia, prunus subhirtella Autumnalis, arbres de Judée... Les arbustes plantés dans un style naturel colorent le jardin au printemps.
La carrière de pierres qui a servi à construire la grande maison d'Edward Hussey a ensuite été aménagée en "jardin sauvage" avec bruyères, azalées, hellébores...
En contrebas du jardin, au-delà d'un pont enjambant les douves, la  promenade au coeur des vestiges du manoir Tudor reste un but de prédilection de la visite.
 
Un jardin de plate-bandes de vivaces dans la cour abritée de l'ancien manoir Tudor

L'ancien château médiéval a été volontairement traité à demi ruiné et transformé en" jardin pittoresque" par Edward Hussey III. 
Le charme de l'abri à bateau pour des promenades en barque dans les douves 
En avant de l'entrée du domaine, face au parking, le vaste ancien potager clos de murs vient d'être remis en valeur.
Le dessin et le rythme des plate-bandes (bulbes de printemps : narcisses, jacinthes, tulipes, aulx d'ornement et vivaces pour fleurs à couper), les fruitiers palissés, le soin apporté aux détails en soulignent la simple élégance. 
Les cultures et les travaux en cours assurés par des bénévoles du National Trust sont annoncés au jour le jour. On peut acheter quelques légumes de saison.

Ce grand jardin a du caractère et une personnalité forte. Les travaux entrepris par le National Trust pour le régénérer étaient nécessaires et il le valait bien. De très vieux rhododendrons, kalmias... ont été rabattus sévèrement en 2018 pour réouvrir les perspectives et les points de vue vers l'ancien château. Les tailles d'arbustes seront poursuivies par étapes jusqu'en 2021 afin de les maintenir dans des dimensions à la fois équilibrées et pratiques. ...Modestement pour les quelques vieux rhododendrons présents ici je n'ai pas fait autrement !  

mardi 18 février 2020

Jardins "sauvages"

Une envie plus forte de "naturel" ou un site qui s'y prête peut conduire à "ensauvager " le  jardin, en laissant des semis spontanés prospérer ou des plantes indigènes vagabonder - au grand dam de ceux pour qui un jardin "il faut que ce soit propre"-.
    
Sissinghurst : Au pied d'un rosier jaune à fleurs simples un geranium phaeum se ressème à foison
La tendance n'est pas nouvelle. "The Wild garden" (*) publié par l'irlandais William Robinson en 1870 fit des émules au 20ème siècle dans toute l'Europe, aux Etats-Unis jusqu'en Australie. En France cette sensibilité gagna du terrain (si j'ose dire...) à partir des années 1980-1990. 
Dans mes années d'apprentissage du jardinage j'ai ainsi été influencée par une anglaise Violet Stevenson ("Créer un jardin sauvage". Nathan. 1995. - encore disponible sur le web-), bien sûr le paysagiste Gilles Clément et d'autres.
L'esprit s'affine aujourd'hui en tenant compte des interactions des plantes entre elles, des questions sur la biodiversité et des évolutions inéluctables du climat. 
De grands jardins anglais y contribuent. Cette plate-bande "sauvage"de printemps est une des surprises rencontrées à Savill Garden (lorsqu'on remonte du Spring Wood,  avec les clairières  "The Glades" et le jardin d'eau "Bog Garden").
The Savill Garden dans le grand parc royal de Windsor
Pour leur part les jardiniers actuels de Sissinghurst innovent. Ils apportent une touche d'ambiance "naturelle" dans des lieux un peu à l'écart : le long des façades nord et est du Cottage, en pied de certains murs, ou en lisière du jardin vers le domaine agricole. 
Sissinghurst : un tapis serré "tricoté  sur la façade nord du Cottage

Pavots des Pyrénées (meconopsis cambrica) qui se ressèment facilement, anémones de bois, fougères, véronique petit-chêne, jacinthes des bois (hyacinthoides non-scripta),... autour de fothergilla  gardenii


 
Sissinghurst : Une échappée depuis le fond du jardin au Sud vers les prairies environnantes

Les rosiers botaniques et hybrides à fleurs simples trouvent facilement leur place : des feuillages indemnes de maladies, de petites roses délicates qui seront suivies de jolis fruits.

Sissinghurst : un rosier botanique à fleurs rose pâle au-dessus d'un tapis mêlant corydales, primevères et digitales.  Non loin, un rosier William III, (rosa spinosissima) rosier pimprenelle avec des boutons en profusion fin mai

Une ambiance "sauvage" au jardin peut être bien différente lorsque le désir est de se transporter ailleurs, de rêver d'autres continents. A Wisley c'est ce que propose entre autres un sous-bois quasi asiatique. 

 
Wisley: Sous le couvert d'un bois de chêne, rhododendrons, ligulaires, epimediums...avec les semis de geranium phaeum (= g.lividum) en couvre-sol : une vivace...originaire d'Europe centrale, fréquente dans les Pyrénées et en Auvergne
(*) Pour en savoir plus : "Le fameux Wild Garden. Le jardin sauvage ou Jardin Naturel". W.Robinson.Traduit en français par Florence André. éditions Petit Génie. 2014