samedi 21 décembre 2019

Les premières fleurs d'hellébores ...bien plus tard

Le "cru" 2019 ne sera pas mémorable. Chaque automne on surveille attentivement l'apparition des premiers bourgeons au coeur des hellébores orientales. Par expérience avec les années on a repéré quels hybrides sont le plus précoces.  (cf. article du 11 novembre 2017).
La première fleur de l'hellébore x Martine Lemonnier le 11 novembre 2017
L'hellébore x Martine Lemonnier donne le "top départ" des floraisons dès novembre. Logique, cet hybride résulte du croisement d'un h.orientalis avec l'hellébore niger (très largement commercialisé pour Noël). Au jardin ici les premières fleurs de l'hellébore x Martine Lemonnier éclairent les couleurs d'automne de l'acer griseum et des épimédium grandiflorum Lilafee.  
11 novembre 2017 : les bruyères d'hiver blanches sont bien fleuries. En 2019 le 21 décembre, elles aussi commencent à peine...
Pas cette fois. A peine distingue-t-on des bourgeons sortir de terre. L'acer griseum est quasi dénudé et les épimédiums caducs entrent en repos. La floraison démarre un mois et demi plus tard donc. Tous les autres hellébores auront-ils un tel décalage début 2020 ? Qui sait? (cf. aussi les articles du 27 janvier 2008 et 3 mars 2019).
On verra! Bonnes fêtes (tempétueuses...), jardinières ou non, à chacune et chacun d'entre vous. 

dimanche 15 décembre 2019

La poésie des ruines : Scotney Castle


Tout le monde n'a pas dans son jardin les ruines d'un logis médiéval ou d'un ancien bâtiment agricole... Il n'empêche. L'aménagement de jardins dans des ruines conservées en l'état est source d'inspiration y compris pour les plus modestes, autour d'un simple "caillou", d'un bout de talus ou pan de mur - vestiges d'un monde à jamais disparu-. A l'intérieur de Great Comp Garden (Kent) une ruine est devenue ce discret coin de repos légèrement en hauteur, ménageant un autre point de vue sur le jardin, à l'écart des visiteurs.
 
Le jardin de ruines à Great Comp Garden. mai 2019
Le jardin de ruines le plus charmant lors du voyage en Angleterre en mai 2019 a investi une ancienne salle du logis primitif de Scotney Castle..... Il faut dire que l'ensemble du site est "bluffant" et spectaculaire. (Scotney Castle dans le Kent géré par le National Trust vaut un article à lui seul et j'y reviendrai).
Vue depuis les douves, la façade extérieure de l'ancien logis ruiné de Scotney Castle 
Le logis médiéval en contrebas du domaine, entouré de douves, abandonné au 19è siècle pour construire sur la hauteur l'ambitieux Scotney New Castle, est dorénavant un "jardin pittoresque".
   
Une large bordure en mélange de vivaces et de bulbes  dans l'ancien logis
A priori tout simple et sans prétention, en réalité recherché et élégant, le jardin de ruines de Scotney Castle retient l'attention des visiteurs nombreux à s'y attarder.
Une plantation" pied de mur" fait face à la large bordure.
Une grande maîtrise des jardiniers est requise pour préserver l'équilibre entre les plantes et l'architecture, réaliser les tailles des végétaux en conservant l'impression de "naturel"  alors que les grimpantes partent à l'assaut des vieux murs sans retenue.
La glycine japonaise à fleurs blanches s'apprête à fleurir
Un porche Renaissance de l'ère Tudor ouvre sur l'ancienne salle en ruines et ce jardin. La consolidation de l'étage en bois serait tout de même bienvenue...

mercredi 11 décembre 2019

Le dryopteris sieboldii : histoire de fougères (suite)

Cette fougère persistante est curieuse, reconnaissable entre toutes. Impossible de la confondre avec les autres, nombreuses et variées, de la même espèce les dryopteris (cf. article du 16 mai 2018). D'origine asiatique (Japon, Chine, Taïwan) on la croirait directement issue des temps préhistoriques.
Le dryopteris sieboldii est indifférent au type de sol, acide ou calcaire. La forme particulière de ses frondes, son aspect mat et coriace (luisant sous la pluie...), les nuances de vert grisé font toute son originalité. Elle est belle à mon avis plantée en masse et "à part" d'autres fougères : près de roches, d'un vieux mur (c'est ainsi que la recommande les producteurs des Jardins Ecoute s'il pleut). 

Son port étalé, dense (40 à 50 cm de haut à pleine maturité) en fait un bon couvre-sol. Le dryopteris sieboldii se développe par des rhizomes traçants et même si sa réputation est d'une croissance lente, sa personnalité fait qu'elle a tout de suite de la présence.
En attendant des touffes de geranium maccrorhizum Spessart joueront les "bouche-trous"
Comme elle supporte l'ombre chaude et sèche, je l'ai disposée entre des blocs tombés de l'ancien talus empierré. Elle ne tolère pas du tout le soleil, même seulement quelques heures au soleil du matin. J'ai dû déplacer un pied qui en souffrait et commençait à jaunir. Le premier été les dryopteris sieboldii ont été arrosés une fois par semaine pendant les grosses chaleurs et les pieds abondamment et constamment paillés de feuilles de chênes sèches pour maintenir une certaine fraîcheur.
A l'extrémité de la voûte des vieux camellias et rhododendrons à floraisons rouges, les dryopteris sieboldii ourleront le talus dans une scène ombragée de mêmes tonalités associant les pieris Mountain Fire, le camellia blanc,  une azalée japonaise Kurume Ward's Ruby, des epidemiums rubrumcylamen coum blancs,  geranium maccrorhizum Spessart...

mercredi 27 novembre 2019

Hommage au noisetier...la Nuttery de Sissinghurst

Dans mon souvenir, la simple grande allée encadrée de noisetiers qui longe la limite ouest du jardin de Sissinghurst avait été un des "coups de coeur" de ce sublime jardin. Bien sûr en 20 ans elle a évolué mais je reste totalement séduite par la justesse de ses proportions, le raffinement de sa composition au-delà de son apparente simplicité.
 
La Nuttery de Sissinghurst: Un double alignement de noisetiers délimite une longue et large allée. Au point central une statue à l'antique.

L'occasion de rendre hommage au modeste noisetier, corylus avellana, familier des campagnes et des vieux jardins (je n'évoque pas ici les créations horticoles pourpres, tortueuses etc.. mais bien l'espèce répandue dans toute l'Europe jusqu'à l'Oural et l'Anatolie).

Les noisetiers régulièrement éclaircis préservent une transparence. En parallèle et en arrière-plan une longue bordure de rhododendrons luteum illumine la Nuttery au printemps

De pousse très rapide, le noisetier donne vite "de la maturité" à un jardin. Son port avec le temps reste très élégant (Vita Sackville-West à Sissinghurst l'a sublimé par cette plantation en alignement).
 Comment rendre compte de toutes les qualités de l'arbuste ? Attrayant et facile aussi bien en isolé (où il prend une jolie silhouette en parapluie), dans un massif d'arbustes qu'en haie libre ou dans des haies taillées en mélange (comme je l'ai remarqué le long des petites routes du Sussex). 
Le sol de la Nuttery est couvert d'un mélange raffiné de différentes espèces de fougères et de vivaces variées plantées en masse : au printemps une harmonie de verts tendres, blancs,anis,jaunes pâles... 

Le noisetier est accommodant sur la qualité du sol, résiste au froid, n'est pas vraiment sensible à la chaleur l'été. Facile à rajeunir et éclaircir (en coupant à ras chaque hiver quelques plus anciennes tiges). Gai par son feuillage vert clair et ses feuilles en forme de coeur. Se reproduisant spontanément par semis : autant de cadeaux pour épaissir une haie ou créer  rapidement un écran (de 2m à 5m de haut). Sans compter les noisettes, la baguette de sourcier (dont je n'ai pas l'expérience) etc....


Un mélange "sauvage" de plantes basses en couvre-sol. Sont associées en différentes séquences plusieurs espèces de fougères à des euphorbes, melica uniflora, trolles, epimediums...

Toutes proportions gardées (!), je bénéficie dans mon nouveau jardin à la fois d'un vieux noisetier isolé (laissé longtemps à lui-même et que j'ai rajeuni progressivement en 2 à 3 ans) et de nombreux semis transplantés au fur et à mesure pour regarnir la haie bord de route.  

Je m'amuse aussi au "trompe l'oeil" en rapprochant visuellement les noisetiers de plusieurs arbustes de la famille des hamamélidacées. Les mêmes feuilles en forme de coeur mais plus grandes ou plus petites, coriaces ou fines, de couleurs variées à l'automne, des ports très différents : corylopsis pauciflora, fothergilla major (encore lui), hamamélis intermedia et pallida, parrotiopsis... De quoi aiguiser l'oeil de l'observateur (trice).     

samedi 23 novembre 2019

Le jardinage... comme la cuisine

Il peut en être du jardin comme de la cuisine : trop lourde, indigeste, des ingrédients qui se contrarient, une accumulation de saveurs qui brouillent tout...avec les meilleures intentions du monde. 
C'est ce qui s'est produit ici dans le massif de bruyères d'hiver à floraisons blanches (cf. article du 7 février 2019). "L'idée" en 2017 d'introduire çà et là des pieds de fothergilla major n'était pas mauvaise.... mais pas à cette échelle. 
Les fothergilla grandissant, le massif apparut deux ans plus tard année engoncé, étriqué, au lieu d'un vaste tapis s'étendant jusqu'au magnolia liliiflora. Et ce n'est pas fini, les fothergilla étant loin d'avoir atteint leur hauteur et volume adultes.
 

Circonstance atténuante je n'avais pas prévu qu'un hydrangea macrophylla planté en lisière (trouvé auparavant végétant dans le sous-bois et transplanté à la lumière), après s'être refait une pleine santé en 3 à 4 ans, élancerait cet été du coeur de l'arbuste de nouvelles tiges hautes ....de près de 2m.  L'hamamélis x intermedia Diane quant à lui, en arrière du magnolia, a poursuivi sa croissance. 
Le déséquilibre des volumes devenait flagrant. Trop c'est trop!
 D'octobre à novembre les fothergilla prennent pour plusieurs semaines leurs magnifiques couleurs d'automne
 Tous les fothergilla sont en passe d'être déplacés, quelques-uns dans le futur sous-bois aux couleurs d'automne, les autres dans une haie toute en fothergilla appuyée sur un vieux rhododendron pontique. Car les fothergilla je ne saurais m'en passer! (cf. l'article du 26 avril 2018 sur les deux "cousins": parrotiopsis  jacquemontiana et fothergilla major). Faire et défaire, n'est-ce pas le lot de tout jardinier?

mardi 19 novembre 2019

Un ravissant dans le genre ...le camellia transnokoensis

Nous avons été nombreux, jardinières et jardiniers, à succomber l'hiver dernier à ce camellia botanique largement diffusé depuis peu dans les jardineries (auparavant plus connu des arboretums et jardins anglo-saxons des deux hémisphères).
 Les boutons à fleurs rose vif colorent l'arbuste dès décembre
Le camellia transnokoensis cumule des qualités très appréciables dans les régions de climat doux en sol acide (zone 8 : -12°). Et comme j'aime décliner les genres plantés ici il y a quarante ans (familles des ericacées, des hamamélis, des Theaceae... dont fait partie le genre camellia) je n'ai pas hésité. 
Pour sa silhouette d'abord, à la fois gracile et fournie, élancée et souple. Pour son feuillage dense (persistant), très abondant de très petites feuilles effilées, bien différent des camellias  "classiques".  
De très nombreuses fleurs, petites (4cm) s'ouvrent pendant des semaines
Et bien sûr pour la profusion de fleurs tout au long de ses branches (dès le plus jeune âge), une floraison de longue durée. Car les fleurs se renouvèlent sans cesse de février à avril. Dès janvier, d'adorables boutons rose vif, joyeux à cette saison hivernale, s'ouvrent progressivement en une myriade de fleurs blanches miniature à la texture de porcelaine, rehaussées d'étamines dorées. 
 
 Photo Tikorangi The Jury Garden. Nouvelle Zélande
 
 
 Photo assoc.bretonne Balades et Jardins. Le camellia transnokoensis plante du mois de février 2019
Au cours du printemps, les couleurs cuivre et bronze du jeune feuillage contrastent avec les verts neutres ou tendres des arbustes voisins : rhododendron, chêne vert, hydrangeas macrophylla... 
 
Photo Pépinières Dauguet
Les fleurs fanées tombent d'elles-mêmes (ce qui est aussi le cas des camellia x williamsii... mais pas des camellia japonica!). L'arbuste reste toujours impeccable. 
Les dernières fleurs en avril éclairent le jeune feuillage cuivré
J'ai planté le camellia transnokoensis à la lisière du sous-bois de pins et chênes, éclairé quelques heures par jour et abrité des vents, entre un vieux rhododendron (au feuillage décidément bien terne) et un hydrangea aspera villosa. Ainsi les floraisons se succèdent au fil des saisons et ce massif sera intéressant toute l'année (selon le principe cher au jardin du Vastérival). 

 Certains annoncent le camellia transnokoensis de pousse lente, d'autres de croissance rapide. Ce camellia botanique de 7 m de haut dans son milieu naturel a été découvert au centre de Taïwan, sur le Mont Noko, d'où son nom. Si j'en juge par l'expérience ici et les + de 20 cm qu'il a développé en une première saison, il devrait aller au-delà des 1,20 x 1,20 m souvent indiqués et atteindre 2 m voire  davantage.
Photo Tikorangi The Jury Garden. Le camellia transkonoensis, un des camellias blancs préférés de Abbie Jury
A Tikorangi The Jury Garden (Nouvelle-Zélande), un jardin paysager privé de style anglais aménagé par une même famille depuis 5 générations, Mark et Abbie Jury ont remplacé une haie de buis par une haie de camellia transnokoensis. https://jury.co.nz/jury-garden/

J'ai remarqué que le prix de vente du camellia transnokoensis affiché cette année peut être onéreux mais j'ai trouvé au moins deux fournisseurs de qualité aux tarifs modérés qui pratiquent la vente en ligne : Lepage bord de mer (pepiniere-bretagne.fr) en pot de 3l, et Roué (en 2l). Sans publicité de ma part,  c'est un "coup de coeur" que je voulais partager avec vous.

samedi 16 novembre 2019

Des forces de la nature

Les vieux jardins recèlent bien souvent de véritables trésors, de ces végétaux qui font la leçon aux fragiles animaux que nous sommes. Des arbres, des lianes qui malgré les vicissitudes du temps, les tempêtes, les maladies, les mauvais traitements résistent, survivent et se régénèrent en dépit de tout.

D'où ce florilège : de véritables titans remarqués lors de notre "tour" au sud de l'Angleterre en mai 2019.
 
De nombreuses espèces originaires d'Amérique plantées à Sheffield Park rendent les hommes bien petits...(2 visiteurs au pied de l'arbre donnent l'échelle)
Mort ou vivant? ...Il faut en faire le tour pour le savoir.
Côté pile, il apparait comme foudroyé : une sculpture puissante terrassée par la foudre
Côté face, "il est reparti" à son pied pour se régénérer...Tout en haut, au coeur de la souche, l'humus accumulé accueille des semis spontanés d'autres essences. "Elle est pas belle la vie ?"

Un figuier (qui sans nul doute "a connu" Christopher Llyod) palissé sur un vieux mur du jardin de Great Dixter a pris le pouvoir
 Parmi la profusion d'espèces et d'hybrides de rhododendrons introduits il y a près de cents ans dans la Saville Valley (Windsor), ce sujet obstinément ne veut pas mourir
   A Wisley une glycine joue à la pieuvre : presque une oeuvre poétique ou de fantasy, une porte qui s'ouvre à l'imaginaire

jeudi 27 juin 2019

Great Dixter "goes on"

Treize ans déjà que Christopher Lloyd s'en est allé. Quel chemin parcouru et combien de pistes ouvertes dans l'art des jardins depuis la création de Great Dixter en 1910-1912. L'importance donnée aux prairies fleuries, la "gestion différenciée", l'attrait des plantes sauvages... étaient au début du 20è siècle totalement d'avant-garde.
La maison et le jardin  tel qu'on le visite aujourd'hui
Great Dixter fut d'abord le jardin précurseur de Daisy Lloyd, mère de Christopher, férue de l'oeuvre de William Robinson : un jardinier révolutionnaire à l'époque, passionné par les plantes indigènes et inventeur du"wild garden", le jardin sauvage....
photo de 1905: Dixter avant Great Dixter
Dixter devient "Great Dixter" quand le père de Christopher, Nathaniel Lloyd, ayant fait fortune et jeune retraité des affaires à la quarantaine achète en 1910 à la limite du Sussex un vieux manoir à pans de bois. Il le fait restaurer, agrandir considérablement, installer tout le confort moderne, fait appel pour cela à un architecte de grand talent Edward Lutyens. L'histoire est connue. (pour mémoire, Edward Lutyens après son apprentissage avait créé son propre cabinet à ...20 ans en 1889. Cela laisse rêveur).
La façade Sud de l'aile neuve construite par E.Lutyens s'ouvre sur une terrasse. mai 2019
Daisy Lloyd et son mari sont des fervents du mouvement "Arts and Crafts" qui prône le retour à la nature, l'inspiration des traditions locales et de l'artisanat pour l'architecture, les arts décoratifs... Great Dixter est une des réalisations les plus représentatives en Angleterre.
En guise de marches entre deux niveaux, Lutyens s'est inspiré d'une tradition locale (pour passer d'un champ à l'autre sans permettre l'accès au bétail) : de simples pierres plates incrustées dans le muret

Nathaniel Lloyd est pressé : dès 1911-1912 les travaux d'aménagement du jardin (clôtures, murs, pavages, escaliers ...),  sont lancés sur des dessins d'Edward Lutyens en même temps que les travaux de la maison. Les premiers schémas de plantations sont établis par un "garden designer" renommé pour ses créations Arts and Craft et précisés selon les préférences de Nathaniel et Daisy Lloyd. Une équipe de 9 jardiniers dont un "head gardener" est recrutée.
 
mai 2019. Le "Sunk Garden", jardin en creux autour d'un bassin, dessiné par Nathaniel Lloyd dix ans plus tard. Au fond sur une ancienne grange un figuier palissé
Harmonie de teintes pastel rose, bleu et pourpre : lilas microphylla (?),ancolies et feuillage glauque de grands thalictrum. Au contraire du goût de Christopher Lloyd qui privilégiait les contrastes puissants de couleurs brillantes et vives, un style dans lequel il excellait.
 Dans le même "Sunk Garden", autre douce ambiance printanière
Au cours de la visite on perçoit aisément que le jardin "tourne autour" de la maison principale et se cale entre plusieurs constructions : Edward Lutyens intégra les anciens bâtiments de ferme dans le parti d'aménagement du jardin. Le dessin et les plantations ont toujours été très étudiés et pourtant l'ambiance partout demeure celle d'un jardin de maison de campagne.
 Les anciens séchoirs à houblon depuis la Topiary Lawn
L'escalier qui mène au verger, dessiné par Edouard Lutyens, a été photographié des milliers de fois. J'imaginais devant une vaste prairie plantée de fruitiers s'étendant au loin sur un paysage de campagne. Qu'en était-il à l'époque? Aujourd'hui le paysage est fermé par de grands arbres ; l'escalier paraitrait presque surdimensionné. Les plantes autour de l'escalier ce printemps sont des plantes simples, une ambiance "naturelle" (sans les cactées et succulentes visibles sur des photos estivales). En cela l'élégant escalier de Lutyens a tout pour me plaire...
L'escalier de Lutyens. mai 2019
Great Dixter est "plus qu'un jardin, un mode de vie" (op.cité). Un art de vivre même...Christopher Lloyd, cadet des enfants de Nathaniel et Daisy Lloyd y aura passé la grande majorité de sa vie. (Il y a vécu son enfance et s'y installe définitivement à 33 ans en 1954). Il épaule et prend le relais de sa mère dans la conduite du jardin, s'occupe personnellement de la pépinière et lui succède à sa mort en 1972. 
Son savoir faire horticole en matière de semis et boutures était immense. Et ses audaces en matière d'utilisation des couleurs stupéfiantes. "La vraie nature du jardinage est expérimentale en même temps qu'éphémère". C.Lloyd. Un jardinier téméraire.p.9.


Une allée étroite "secondaire" (dans le High Garden?) attire par des couleurs vives et contrastées que Christopher Lloyd aimait tant.mai 2019
Ce que j'admire et apprécie chez lui par dessus tout, c'est son esprit libre, faisant fi des conventions, une curiosité inlassable, son désir d'expérimenter encore et encore...et son humour qui peut être plein de tact ou féroce! Lire ses ouvrages procure de très bons moments et bien des éclats de rire.

 
Un jardin vertical : arbres fruitiers et lianes d'ornement sont palissés sur les façades de la maison et les murs d'enceinte
Depuis longtemps je connaissais Great Dixter par des lectures et ( "of course") par les très nombreuses photos de la célèbre longue bordure "Long Border" (au sud-est sur le plan du jardin) prises par les plus grands photographes du monde entier.... Je ne l'ai pas photographiée.
Incontestablement Christopher Lloyd m'aura beaucoup appris. Il a encouragé une façon de faire : tenter, essayer, reconnaitre le bénéfice que l'on tire de ses échecs, ne pas se contenter des réussites, chercher de nouvelles idées, tirer profit des semis naturels, dessiner une allée tondue dans une prairie fleurie etc,etc... Prodigue en conseils, son enthousiasme et son énergie étaient communicatifs.
 mai 2019. La prairie fleurie du verger (Orchard) face à l'escalier de Lutyens
L'allée principale qui mène tout droit à la maison traverse une première prairie encadrée de haies d'ifs, le "Meadow Garden" (cf. plan).
Cette deuxième quinzaine de mai la prairie non tondue, si chère à Christopher Lloyd, n'était plus vraiment fleurie. Les bulbes de narcisses étaient "passés", quelques rares camassias fleurissaient encore. Mais quelles justes proportions et l'évidence d'un accord parfait avec le caractère d'une vieille maison de campagne traditionnelle.Un accord pas toujours compris des visiteurs (cf. les textes de C.Lloyd rapportant leurs remarques...).

Le jardin exotique "Exotic Garden", tout juste renaissant après l'hiver. un ton sur ton réussi entre les canes du bambou et le rachis des frondes de la fougère
Le jardin m'a paru simplifié par endroits, épuré, si l'on compare à des clichés anciens. Cela ne m'a pas perturbé puisque par principe le jardin de Christopher Lloyd a toujours été en constants changements et expérimentations. 
Ce printemps 2019 les semis naturels de quelques vivaces (particulièrement généreuses) étaient abondamment mis à contribution, accentuant l'aspect multicolore et pointilliste des jardins Est (un peu répétitifs peut-être). Ou alors je suis allée "trop vite" pour mémoriser les distinctions.
Une (heureuse) surprise, certains lieux du jardin "tout en verts".
Great Dixter est différent de celui auquel je m'attendais, très souvent photographié à l'apothéose l'été, magistralement coloré et fleuri. Le charme reste intact et opère. J'aurais souhaité pouvoir y retourner en 2010 pendant l'été (...après le B..t ?). "Wait and see"  

Pour en savoir plus je recommande plusieurs ouvrages de Christopher Lloyd traduits en français. Entre autres:
*C.Lloyd. Un jardinier téméraire. La Maison Rustique. Flammarion. 1990 (p.231. le chapitre sur les visiteurs est très drôle). 
*Beth Chatto. Christopher Lloyd. Jardins anglais. Correspondance. Christian Bourgois éditeur. 1999
En anglais:
*C. Lloyd. In My Garden. The Garden Diairies of Great Dixter. Bloomsbury. 2010
*Dear Christo. Memories of Christopher Lloyd at Great Dixter.Timber Press. 2010
*C. Lloyd. The well-tempered garden. Phoenix. 2014
*cf. aussi le guide du jardin (plus fourni en anglais) : A Guide to Great Dixter. Great Dixter House & Gardens. 2019

samedi 22 juin 2019

Humour british au jardin

Que ce soit dans la vénérable institution qu'est Wisley ou dans le jardin iconoclaste de Christopher Lloyd à Great Dixter j'ai remarqué quelques détails non dénués d'humour. Entre deux longs (trop longs?) articles sur les merveilleux jardins anglais de mon récent voyage, voici quelques "flashes" pris lors des visites. 
A Wisley
 Pendant que les jardiniers s'affairent au loin les brouettes tournent en rond

 
 Un "combi" Wolkswagen customisé incite à protéger l'environnement
 
A l'abri de la pluie ou du soleil, les sièges du Water Lily Pavilion sont prétexte au jeu du passe-parole ou "téléphone arabe" 


 A Great Dixter
 Méridiennes et canapés en bottes de paille sont à disposition pour la sieste
 
Une mini barrière symbolique (et efficace) efface un sentier créé par le piétinement répété des visiteurs

De l'humour? .....Décidément ils sont "crazy" (Wisley)


mercredi 19 juin 2019

Les arbres somptueux des parcs anglais

J'ai beaucoup d'admiration pour les jardiniers paysagistes qui créèrent il y a longtemps, plusieurs décennies, une centaine d'années voire plus, les grands parcs et jardins anglais. 

Ces passionnés étaient à la fois généreux et visionnaires. Ils ne pouvaient que solliciter leur imagination (outre leurs connaissances et leur curiosité) pour anticiper les résultats de leur dessin, l'évolution au fil du temps des jeunes plantations, le comportement de grands sujets venus d'autres continents, les effets produits par leurs associations.  Nous en jouissons maintenant. Quelle leçon! 
 
Plusieurs parcs et jardins du sud de l'Angleterre visités en mai 2019 sont avant toute chose de grands paysages arborés. Les arbres créent des plans successifs, allongent ou réduisent les perspectives. Les associations de différentes espèces choisies pour leurs formes, hauteurs, textures, tonalités différentes ont été visiblement chaque fois soigneusement réfléchies. Les résultats sont spectaculaires particulièrement dans le Sheffield Park.
Sheffield Park. "the Middle Lake" , un des 4 plans d'eau étagés jusqu'au fond de la vallée
Dans ces parcs l'aménagement de plans d'eau à partir de ruisseaux, d'anciens étangs ou marais fut autant d'opportunités de créer des scènes paysagères exceptionnelles.

Les nombreuses espèces d'arbres importées d'Amérique du Nord se remarquent par leur grande hauteur rarement atteinte sur le continent européen.
Saville Gardens en direction du "Spring Wood". Le banc donne l'échelle
En sous-bois les rhododendrons, très à la mode au début du 20ème siècle (par les découvertes successives de nouvelles espèces et les premières hybridations de passionnés) ont été fréquemment plantés. Avec le temps ils ont pris des silhouettes d'arbres aux écorces magnifiques.
Savill Garden. Dorénavant les floraisons tout en haut des arbustes s'admirent ...en prenant du recul
Les jardiniers d'aujourd'hui anticipent le remplacement de sujets en fin de vie ou plantent d'autres petites espèces entre deux. "The show goes on".
Sheffield Park. Un  jeune cornus alternifolia aurea planté dans une clairière
Un bel érable palmatum accueille les visiteurs à l'entrée du parc de Sheffield