samedi 16 février 2019

La melica uniflora alba, une graminée épatante

"Nulle autre graminée capte la lumière avec tant de douceur". On ne saurait mieux dire. C'est ainsi que J.P. Cordier présente les melica ou "herbes aux perles" (Guide des plantes vivaces. Horticolor. 1997). Alors que les graminées sont revenues à la mode en France depuis longtemps il semble que les méliques aient été quelque peu oubliées (hormis la mélique ciliée - melica ciliata-). 

Celle-ci la melica uniflora f.alba ou albida est plus fréquemment cultivée en Angleterre. C'est d'ailleurs dans le jardin de Clare Oberon, paysagiste anglaise installée en Bretagne (cf. article du 20 juillet 2017) que je l'ai vu pour la première fois. 
 La melica uniflora alba chez Clare Oberon dans un mélange de vivaces en bordure d'un massif d'arbustes à l'ombre
La melica uniflora alba était en fleurs début juin c'est à dire ornée de minuscules grains de riz blanc qui brillaient dans l'ombre. Une légèreté et une grâce qui m'ont épatée. 
C'est une "native" présente en Europe, répertoriée dans les forêts de hêtres des Vosges,  dans le Bassin Parisien... Dommage de l'oublier car cette graminée n'est pas difficile. Indifférente à la nature du sol elle convient à l'ombre sèche, ce qui dans les temps actuels.... Elle fleurit abondamment pendant 3 mois, de mai à juillet.  La hauteur du feuillage très fin (plus que la luzule), vert frais, varie de 30 à 60cm. Si elle se plait, elle peut coloniser un espace. La pépinière de Beth Chatto Gardens (Colchester.Essex) la recommande en compagnie de fougères, d'hostas, du dicentra Langtrees...
Par chance Philippe Le Goff (pépinière Le Clos d'Armoise) l'avait multiplié et j'ai pu la planter l'année dernière en pied de talus, dans la partie la plus ombrée, près d'une ancienne souche en compagnie de fougères (polystichum polyblepharum), geranium phaeum Blauwoet et disporopsis pernyi
 Un des jeunes plants introduits au jardin en mai 2018 
La melica uniflora alba n'a cessé de fleurir jusqu'à l'automne et s'est déjà un peu étoffée. Les jeunes plants avaient pris l'hiver l'allure d'une chevelure blonde. Je viens de remarquer qu'ils n'attendent pas le printemps pour "repartir". 

jeudi 7 février 2019

Blanc manteau, les bruyères d'hiver (erica x darleyensis)

A l'ouest en bord de mer la neige fait défaut l'hiver. Pas de lumière si particulière ni de crissements sous les pas (j'admire avec envie les photos postées ces jours sur les blogs amis). En compensation, si je puis dire, j'étends chaque année un peu plus un tapis de bruyères d'hiver à floraison blanche, erica x darleyensis, près de la maison, à l'est sur la pente jusqu'au magnolia liliiflora nigra et  l'hamamélis Diane. En émergent çà et là 5 pieds encore jeunes de fothergilla major et 2 rhododendrons nains calostrotum ssp.keleticum (à peine plus hauts que les bruyères : 0,60cm). 
En avril la floraison blanc crème des fothergilla prendra le relais des bruyères et la touche des rhododendrons s'accordera à la floraison du magnolia.

Les erica x darleyensis ont pour origine un hybride naturel issu du hasard, un croisement inattendu et remarqué entre deux espèces cultivées dans un même jardin anglais il y a près de cent ans...une erica carnea et une erica erigena (ou mediterranea). Les croisements ont été favorisés depuis par les producteurs qui ont créé de nombreux cultivars.
Les erica x darleyensis ont bien des atouts. Rustiques elles apprécient les sols très acides comme légèrement calcaires à condition que le sol soit drainé à léger. Vigoureuses, elles occupent en peu d'années un espace conséquent, chacune de 0,60 à 0,70cm de large, jusqu'à former un couvre-sol efficace étouffant  les adventices. Je les aide les premières années en désherbant consciencieusement et en déposant à l'automne entre les jeunes plants un tapis de feuilles de chênes. 
Plus à l'ombre sous les branches basses du magnolia liliiflora nigra plusieurs hellébores orientales "White ladies spotted" remplacent les bruyères. Elles annoncent par leurs pétales mouchetés de rouge pourpre (de façon prémonitoire...) la floraison printanière du magnolia.
La floraison de ces bruyères d'hiver qui commence vraiment ici à la mi-janvier est abondante et longue.  Leur nectar est très apprécié des insectes et le tapis "bourdonne" véritablement les beaux jours d'hiver.  
J'ai mélangé trois variétés différentes d'erica x darleyensis à floraison blanche au fur et à mesure de l'extension du tapis. Les nuances se remarquent à peine pendant la floraison mais apportent des variations pendant l'été et l'automne par le feuillage vert foncé, vert clair, vert tendre selon les variétés, ce qui évite la monotonie. 
* Silberschemlze, au feuillage d'un vert soutenu, vigoureuse, d'origine allemande (40cm).
*White Glow, compact, au feuillage foncé avec des pointes rosées en mai, plus basse (25cm) en bas du tapis.
*White Perfection, la première à fleurir, au port érigé (40cm).Cette variété plus récente a obtenu un Award Garden of Merit de la RHS.  
Le tapis composé maintenant d'une cinquantaine de pieds commence cette année à prendre "de l'allure". Au printemps la floraison passée, il sera indispensable de tailler l'ensemble à la cisaille pour une remise en forme et surtout éviter un vieillissement prématuré : épointer sans tailler sur le vieux bois, dès la première année de plantation.
Encore trois conseils issus de l'expérience... (pas toujours heureuse) : planter profond en enterrant la base du feuillage, arroser régulièrement les deux premières années les jeunes plants qui sèchent très rapidement, vérifier quelque temps après la plantation que la motte ne s'est pas déchaussée, péril mortel pour la plante. 
Enfin Bernard de la Rochefoucauld (Arboretum des Grandes Bruyères en forêt d'Orléans à Ingrannes.45) a partagé ses connaissances dans un ouvrage édité en français par Rustica (1997) "La bruyère. Choix des variétés, culture, associations", utile et qu'on trouve encore en vente en ligne.    

lundi 4 février 2019

Houx! houx!houx! (suite et fin)

Les fêtes des plantes sont toujours source de découvertes chez les pépiniéristes collectionneurs. Le premier week-end de septembre 2018 avaient lieu "Les journées des plantes de Guerlesquin", petite cité de caractère située en centre Bretagne (29). J'y étais pour la première fois surprise de découvrir ce lieu joli et accueillant, l'ambiance chaleureuse et communicative, une organisation  impeccable. Cette fête des plantes réunissait sous l'impulsion de la pépinière Sous un arbre perché une palette formidable de 30 producteurs collectionneurs dont plusieurs venus de loin, des quatre coins de la France : Mela Rosa, Maurice Laurent, les Laurains, des Deux Caps, Plantemania... sans les citer tous. 
Parmi les meilleures pépinières bretonnes, beaucoup étaient là. Plusieurs conférences étaient aussi proposées dont celle de Catherine Le Berre sur les plantes d'automne du Japon à laquelle j'ai pu assister, passionnante.  (En 2019 , les Journées des Plantes de Guerlesquin auront lieu les 15 et 16 septembre. A noter sur l'agenda.www.journeesdesplantesdeguerlesquin.fr).

 Le tout jeune ilex September Gem planté dans la haie en mélange d'arbustes 
Revenons-en aux houx. Sur le stand de Joël Le Cam (Pépinières Botaniques Armoricaines. St-Adrien. 22) se trouvaient plusieurs pépites - comme toujours chez lui - dont un houx au feuillage très clair, au port touffu et vigoureux, réputé de pousse rapide et dense : l' ilex September Gem, un hybride i. ciliospinosa x i.aquipernyi de 1957. Tolérant à la chaleur et au soleil, il fructifie très tôt en septembre (d'où son nom) de baies d'un rouge profond qu'il gardera longtemps, en principe... Il occupera dans la haie avec le temps un volume de 2x2m. Le vert tendre de son feuillage apportera de la lumière en contraste avec les arbousiers, chênes verts, ilex aquifolium plus sombres. D'un vert jaune et non bleuté ce houx est encore éclairci par des tiges aux mêmes tonalités.


vendredi 1 février 2019

Houx! houx! houx! quelle bonne idée

Merci à Berthille pour cette très bonne idée d'un article sur les houx (article du 16 janvier 2019). Ici aussi l'ilex aquifolium prospère spontanément dans les sous-bois de chênes et c'est ce qui m'a guidé. 
L'ilex aquifolium fréquent en sous-bois, multiplié par les oiseaux (très amateurs de ses baies) qui en dispersent les graines. Le feuillage est plus mat que d'autres cultivars
 On dit le houx de pousse lente et j'ai malgré tout voulu en faire le test en l'utilisant comme un des persistants dans l'écran de bord de route.  Une haie défensive à recréer, plus  "naturelle",  faite d'un mélange d'espèces spontanées caduques et persistantes (fusains d'Europe, aubépines, rosiers sauvages, chênes verts, arbousiers...), les arbustes décidément trop voyants dans ce site (céanothe, forsythia...) ayant été supprimés à mon arrivée.
J'ai laissé pousser des semis d'ilex aquifolium déjà en place. D'autres trouvés dans le jardin ont été replantés...avec un succès aléatoire. Certains ont séché très rapidement (malgré une attention régulière pour l'arrosage) ou au cours de l'été suivant. Leur unique racine en pivot ne facilite sans doute pas les choses. 

D'autres très jeunes plants ont grillé leurs parties aériennes... et sont repartis ensuite avec une bonne vigueur.  Et "une fois partis, ils sont partis". Les premiers semis naturels préservés en 2012 atteignent 1,70m sur 1,50m de large (....après 6 ans certes). Je les épointe seulement pour les maintenir en forme et leur éviter un port parfois dégingandé.  (Un ami architecte paysagiste m'a pourtant affirmé qu'ils détestaient être taillés. Qu'en penser?).
Je n'en suis pas restée là...Pour varier, avec discrétion, l'attrait  de cette espèce, j'ai introduit plusieurs variétés. Et d'abord le houx J.C Van Tol (du nom de son obtenteur hollandais) vanté et repéré il y a fort longtemps dans les magazines de jardinage. Autofertile, le houx J.C Van Tol est quasi sans épine, d'un joli port élancé et pyramidal, le feuillage sombre brillant. Les fruits nombreux (quand l'arbuste devient adulte) sont bien visibles de même que ses petites fleurs blanches au printemps, les tiges violacées. Par contre il n'est pas très fourni et je l'épointe systématiquement chaque année pour l'encourager.
Aucun risque de se blesser avec l'ilex Johny Van Tol
A l'inverse l'ilex aquifolium Alaska est particulièrement agressif. En tant que cultivar femelle, la fructification est garantie. Encore un qui repart vigoureusement du pied après un accident de culture.  D'origine horticole il a été obtenu dans les années 1960 en Allemagne (obtenteur :Mr Nissen. ville de Wuppertal)
Très branchu, le houx Alaska peut être utilisé en brise-vent. Lui se prête très bien, parait-il, à la taille.

Enfin l'été dernier sur une fête des plantes, Joël Le Cam (Pépinières Botaniques Armoricaines) avait apporté un spécimen étonnant... auquel je n'ai pas résisté. J'y reviendrai dans mon prochain article.